REFLEXIONS ET PISTES SUR LE TRAITEMENT MECANO-BIOLOGIQUE

SITUATION - PARTIE III

1- EUROPEENNE

1.1 - Directive sur la mise en décharge

Sous l’impulsion de la directive n°1999/31/CE du 26 avril 1999 concernant la mise en décharge des déchets, qui vise à réduire les quantités de déchets fermentescibles reçues par les installations de stockage, de nombreuses installations de TMB ont vu le jour en Europe.
D’après l’article 5 relatif aux déchets et traitements non admis dans les décharges, « Les Etats membres définissent une stratégie nationale afin de mettre en œuvre la réduction des déchets biodégradables mis en décharge […] », aux plus tard deux ans après l’entrée en vigueur de cette directive. Cette stratégie doit comporter des mesures en faveur de la valorisation organique. Elle doit permettre d’atteindre l’objectif de réduire la quantité de déchets municipaux biodégradables mis en décharge :

  • en 2006, à 75 % en poids de la totalité des déchets municipaux biodégradables produits en 1995,
  • en 2009, à 50 % en poids de la totalité des déchets municipaux biodégradables produits en 1995,
  • en 2016, à 35 % en poids de la totalité des déchets municipaux biodégradables produits en 1995.

Suite à cette directive de nombreux pays, comme l’Allemagne, l’Espagne ou l’Italie, ont mis en place des installations de TMB avec pour objectif la stabilisation avant enfouissement. En effet, dans la majorité des pays européens, le TMB est uniquement utilisé pour stabiliser la matière organique afin de réduire la quantité de déchets mis en décharge.

Par exemple en Allemagne, le contexte réglementaire est à l’origine du développement des installations de TMB. En effet, l’instruction technique réglementaire de 1993 sur l’élimination des déchets (TASi[2] ) a imposé à partir du 1er juillet 2005 de ne pas dépasser un taux de 5 % de matière organique dans les ordures ménagères en enfouissement. De plus, la production de compost en vue d’une utilisation agricole n’est autorisée qu’aux installations de traitement de déchets fermentescibles et de déchets verts collectés sélectivement. La politique de gestion des déchets en Allemagne s’oriente donc vers la stabilisation des déchets avant stockage. Mais cette réglementation possède des limites puisque les installations de stabilisation peinent à respecter ce critère très strict de 5 %.

Il n’existe pas de transposition de l’article 5 de la directive en France. L’arrêté du 9 septembre 1997 relatif aux installations de stockage de déchets non dangereux fixe les prescriptions techniques de construction et d’exploitation mais ne définit pas de valeur limite sur la teneur en matière organique ou la biodégradabilité des déchets à enfouir. Cependant les objectifs fixés par cet article sont suivis par la Commission européenne. Selon les pouvoirs publics, l’objectif de 2009, de réduire la quantité de déchets municipaux biodégradables mis en décharge à 50 % en poids de la totalité des déchets municipaux biodégradables produits en 1995, est déjà atteint.

1.2 - Directive relative aux déchets

La directive 2008/98/CE relative aux déchets hiérarchise les modes de gestion des déchets. Elle met l’accent sur la prévention. Puis elle fixe comme priorité le réemploi et le recyclage dont les opérations de compostage, vient ensuite la valorisation énergétique et enfin l’élimination. Elle incite donc à privilégier les modes de traitement qui permettent une augmentation du taux de valorisation matière et/ou énergétique. Pour les déchets fermentescibles, cette réglementation permet de justifier le choix du TMB en vue de la valorisation.

2 - FRANCAISE

Il n’existe aucune réglementation spécifique relative au TMB. Les réglementations qui s’imposent aux installations de TMB sont celles qui traitent des déchets organiques, des installations de compostage, de méthanisation et de stabilisation, et de la mise sur le marché des produits.

2.1 - Grenelle de l'environnement

La loi n°2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement suit les lignes directrices de la directive 2008/98/CE et fixe un certain nombre d’objectifs pour la gestion des déchets dans son article 46.

Il précise que « les quantités de déchets partant en incinération ou en stockage seront globalement réduites avec pour objectif, afin de préserver les ressources et de prévenir les pollutions, une diminution de 15 % d'ici à 2012 ».
Cette volonté de diminution des quantités de déchets dédiées à ce type d’installations peut inciter au développement du TMB qui stabilise la matière organique et donc baisse la quantité de déchets.

Cet article, dans le cadre de la politique de réduction des déchets, fixe notamment l’objectif national suivant : « Augmenter le recyclage matière et organique afin d'orienter vers ces filières un taux de 35 % en 2012 et 45 % en 2015 de déchets ménagers et assimilés ».
L’article 46 de la loi précise également l’importance d’ « améliorer la gestion des déchets organiques en favorisant en priorité la gestion de proximité de ces derniers, avec le compostage domestique et de proximité, et ensuite la méthanisation et le compostage de la fraction fermentescible des déchets ménagers […] ». Pour atteindre cet objectif, « la méthanisation et le compostage de la fraction fermentescible des déchets séparés à la source seront encouragés dans un cadre de cohérence nationale et d'engagements contractuels de tous les acteurs concernés pour assurer notamment la qualité environnementale, sanitaire et agronomique des composts et la traçabilité de leur retour au sol, ainsi que la qualité du biogaz […] ».
Un panel d’outils, dont le TMB, pourrait être utilisé pour atteindre cet objectif d’augmentation de la valorisation organique. Cependant, selon le Grenelle, le compostage ou la méthanisation des déchets fermentescibles collectés sélectivement est à privilégier par rapport au TMB sur OMR.

2.2 - Circulaire relative à la gestion des déchets organiques

La circulaire ministérielle du 28 juin 2001 relative à la gestion des déchets organiques rappelle les enjeux de la valorisation biologique et l’exigence de qualité irréprochable et d’innocuité des fertilisants organiques produits, elle recommande l’intégration de la valorisation biologique dans un système durable de gestion des déchets, ainsi que l’information et la concertation autour d’une filière assurant une qualité des produits et une fiabilité des débouchés. Elle préconise pour les unités de tri-compostage d’ordures ménagères existantes de se reconvertir en installation de pré-traitement mécano-biologique avant enfouissement en décharge, ou pour améliorer la qualité du compost d’utiliser les unités sur des biodéchets collectés sélectivement. Elle ne recommande donc pas la création d’installations de TMB pour le compostage ou la méthanisation.

2.3 - Réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement

Les installations de compostage et de méthanisation sont soumises à la réglementation des Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE) (livre V, titre Ier du code de l’environnement).

Type d'installation Rubrique ICPE Régime Arrêté fixant les règles techniques applicables à ces installations
Installation de compostage de la fraction fermentescible des ordures ménagères 2780-3 Autorisation Arrêté du 22 avril 2008
Installation de méthanisation d'ordures ménagères 2781-2 Autorisation Arrêté du 10 novembre 2009
Installation de stabilisation biologique 2780-3 Autorisation Arrêté du 22 avril 2008

2.4 - Réglementation sur les matières issues du TMB

Les matières issues de l’exploitation des installations de compostage et de méthanisation sont soumises à des réglementations spécifiques.

Contrairement à d’autres pays européens, la France autorise le compostage d’ordures ménagères résiduelles. Depuis février 2009, le compost produit doit obligatoirement répondre à la norme NFU 44-051. Il doit respecter des critères de composition en éléments fertilisants et des critères d’innocuité.
Cette norme autorise des teneurs en métaux et en inertes supérieures à celles d’autres pays européens. A terme, l’adoption d’une réglementation européenne sur les composts pourrait fixer des valeurs limites inférieures à celles de la norme française afin de s’aligner sur les critères des autres pays. Cependant les écarts existants entre les critères de qualité de compost exigés en France et ceux d’autres pays européens doivent être relativisés puisque les techniques d’analyse sont différentes.
La norme NFU 44-051 est en cours de révision, elle pourrait envisager d’introduire des critères plus stricts que ceux actuels. Les collectivités territoriales ont donc besoin de connaître la qualité de compost qui sera exigée dans l’avenir.
Par ailleurs, le projet de directive européenne sur les biodéchets, qui n’a pas abouti, avait prévu de réserver le compostage aux déchets fermentescibles triés à la source, la France étant l’un des seuls pays à autoriser l’épandage du compost issu d’une fraction organique triée mécaniquement sur des terres agricoles.
Un projet de règlement européen, dont la sortie est prévue pour octobre 2012, devrait autoriser le statut de produit uniquement aux composts issus de biodéchets collectés sélectivement et répondant aux critères de qualité, les composts issus de TMB garderaient leur statut de déchet et devraient alors être épandus.
Si une interdiction d’utilisation de compost issu d’ordures ménagères résiduelles en agriculture n’est pas imminente, elle pourrait à terme être appliquée au niveau européen et ainsi compromettre l’existence même des installations de TMB.

Contrairement au compost, le digestat issu de la méthanisation n’est soumis à aucune norme. En théorie, il peut être valorisé par épandage agricole en répondant aux exigences des articles L. 255-1 à L. 255-11 du Code rural, un plan d’épandage doit alors être défini pour utiliser ce digestat. Il conserve alors son statut de déchet.
Dans le cas où le digestat répond aux critères spécifiques des amendements organiques de la norme NFU 44-051, il peut être homologué.
Dans la pratique, il est en général composté pour être sûr de répondre aux exigences de la norme NFU 44-051.
Dans le cas de l’homologation ou de la normalisation, le digestat est considéré comme un produit.

Le biogaz produit lors de la méthanisation est épuré pour être valorisé sous forme d’énergie thermique ou électrique. L’arrêté du 19 mai 2011 fixe les conditions d’achat de l'électricité produite par les installations qui valorisent le biogaz. La vente de chaleur produite par le biogaz n’est pas encadrée par un texte de loi. Les textes réglementaires autorisant l’injection de biogaz dans le réseau de gaz naturel devraient être publiés au cours de l’été 2011.

AVIS DU CERCLE NATIONAL DU RECYCLAGE :

L’enjeu du TMB pour les collectivités territoriales est de répondre aux objectifs fixés par la loi du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement. Elles doivent favoriser l’augmentation de la valorisation organique, qu’il s’agisse de valorisation matière ou énergétique, elles doivent pour cela choisir le traitement le plus adapté au contexte local.
Si elles font le choix de produire du compost, elles doivent répondre au minimum à la norme NFU 44-051 afin de trouver des débouchés. Cette norme risque d’évoluer vers un durcissement des seuils ce qui pourrait compromettre les exutoires des produits issus du TMB.
Il est primordial de rappeler que l’Etat privilégie la valorisation organique des déchets organiques triés à la source, à d’autres voies comme le TMB. La réglementation européenne pourrait même remettre en cause le TMB en accordant le statut de produit uniquement aux composts issus de biodéchets collectés sélectivement.

[2]TASi : Technische Anleitung Siedlungsabfall

flecheretour

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