QUEL DEVENIR POUR LES MACHEFERS D'INCINERATION D'ORDURES MENAGERES ?



QUELS DEBOUCHES POUR LES MACHEFERS ?     PARTIE V


La circulaire du 9 mai 1994 classe les mâchefers en 3 catégories : V, M ou S par analogie aux termes valorisable, mâturable et stockable (Cf. valeurs II. 2.). Le non-respect d’une des valeurs mentionnées dans la circulaire déclasse obligatoirement les mâchefers produits modifiant de ce fait les débouchés envisageables.

Les voies d’écoulement présentées ci-après sont fonction du contexte local. La facilité à trouver des filières de débouchés pour les mâchefers varie par exemple selon l’existence de carrières régionales d’extraction de matériaux naturels qui concurrencent l’utilisation de MIOM. De même, le nombre de chantiers routiers susceptibles d’absorber les quantités de mâchefers produits varie selon les régions. Plusieurs aspects locaux conditionnent donc la pérennité de la filière.


1    Les mâchefers de classe S


L’unique destination pour ces matériaux à forte fraction lixiviable est le centre de stockage permanent pour déchets ménagers et assimilés dûment autorisé.

Il convient d’insister sur le potentiel polluant de ces mâchefers qui doit obliger le producteur à procéder à un traitement complémentaire avant le stockage lorsque cela s’avère nécessaire. Ces précautions peuvent permettre d’éviter l’envoi des MIOM en centre d’enfouissement technique pour déchets dangereux et donc limiter un coût d’élimination très élevé.


2    Les mâchefers de classe M

2.1    Les filières d'écoulement


Les mâchefers de catégorie M ont actuellement trois débouchés possibles. Les coûts d’élimination et le contexte local conditionnent le choix du producteur de MIOM face aux différentes voies.

Selon le niveau de qualité des mâchefers, la collectivité peut choisir de traiter ses mâchefers au sein de l’unité d’incinération. Les utilisateurs de mâchefers viennent alors s’approvisionner directement sur le lieu de production. Cette possibilité suppose tout de même une étape de criblage et de déferraillage ainsi qu’une mâturation à la sortie des fours. Un récupération des lixiviats lors de la phase de maturation permet de limiter l’impact environnemental de ces jus chargés en éléments polluants.

Lorsque l’UIOM ne dispose pas de place ou lorsque le traitement nécessaire à l’atteinte des valeurs de la classe V est plus important, il devient plus judicieux, sur les plans techniques et économiques, d’envoyer les MIOM de classe M vers des installations de maturation et d’élaboration des mâchefers (IME). Le choix est principalement fonction de la présence ou non à proximité d’une telle installation.

La collectivité responsable de l’UIOM reste toutefois libre d’envoyer l’intégralité de ses résidus en centre de stockage. Le coût du stockage est supérieur à la valorisation. Le choix s’oriente donc vers l’envoi en IME lorsque celle-ci est proche du lieu de production. De longues distances de transport sont à considérer comme une aberration économique.

2.2    L'installation de maturation et d'élaboration des mâchefers (IME)


L’objectif du passage en IME est d’abord de produire des mâchefers de classe V. La plupart des IME disposent en plus de laboratoires qui leur permettent d’élaborer un produit répondant toujours mieux aux attentes des utilisateurs. Ces unités de traitement sont intégrées à l’UIOM ou sont autonomes et traitent les MIOM de plusieurs unités.

Le passage en IME se compose des étapes du schéma suivant :

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Schéma simplifié d’une Installation de Maturation

et d’Elaboration de mâchefers

Chaque étape se résume de la façon suivante :

le stockage : on constate lors du stockage une oxydation et une carbonatation naturelles ainsi qu’une baisse du pH qui sont à l’origine d’une réduction du potentiel polluant du MIOM ;

le criblage : le passage en trommel permet de calibrer les mâchefers (entre 20 et 31,5 mm) afin de répondre aux exigences des utilisateurs de MIOM en techniques routières. Les graves refusées au trommel peuvent être utilisées en chantiers de travaux publics ;

le déferraillage : les ferreux sont extraits des flux grâce à l’overband pour être ensuite valorisés dans la filière appropriée. Une étape de soufflage combinée à l’overband permet d’ôter les imbrûlés du flux de refus. De plus en plus d’unité installent également un courant de Foucault afin de capter les métaux non ferreux tels que l’aluminium et le cuivre. La plupart des IME peuvent ainsi atteindre le niveau « zéro déchets ».

Après le passage en overband, les IME peuvent choisir d’additionner au matériau un liant hydraulique. Il semble toutefois que l’utilisation de mâchefers traités soit délicate pour certains travaux routiers. La nature hétérogène des mâchefers engendre une variation de la cinétique de prise du liant sur le matériau, ce qui peut entraîner des répercussions après mise en place du produit en technique routière.


3    Les mâchefers de classe V


Dans le contexte réglementaire et législatif actuel, les mâchefers qui répondent aux critères de la catégorie V peuvent être utilisés en technique routière. La structure routière se construit sous forme de couches réalisées avec des matériaux aux propriétés différentes. Conformément au schéma ci-dessous, les mâchefers peuvent se substituer à des matériaux naturels dans les couches de fondation, de forme ainsi que dans les remblais. Les critères de qualité et les précautions d’utilisation des mâchefers évoluent selon la couche destinataire du produit.

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Quelle que soit l’utilisation des mâchefers de catégorie V, celle-ci se fait de manière à limiter les contacts avec les eaux météoriques qui engendrent un lessivage des polluants.

3.1    L'utilisation en remblais routiers


Comme le montre le schéma ci-dessus, l’intérêt de l’utilisation de mâchefers en remblais réside dans la possibilités d’un écoulement massif des quantités produites. La circulaire du 9 mai 1994 préconise toutefois la limite de hauteur de couche à 3 mètres maximum avec en surface une structure routière, un parking ou un couvert végétal de 0,5 mètre.

Les guides d’utilisation des mâchefers recensés dans la rubrique « références bibliographiques » donnent à l’utilisateur l’ensemble des informations techniques nécessaires à une exploitation rationnelle du matériau. Condition et niveau de compactage, épaisseur de régalage et caractère géotechnique sont autant de points abordés dans les documents qui permettent une bonne sécurité quant à l’utilisation en remblais routiers.

Sous réserve du respect des conditions mentionnées dans ces documents de référence, la valorisation des mâchefers en remblais routiers ne présente pas de risques majeurs de dégradation de l’ouvrage. Seul un état hydrique inapproprié lors de la mise en place du matériau peut laisser craindre l’apparition de problèmes. Les propriétés physiques des MIOM leur confèrent un comportement particulier lorsqu’ils sont saturés en eau. Des phénomènes de matelassage ou encore des gonflements peuvent apparaître lorsque les précautions d’usage ne sont pas prises.

Si ces réactions défavorisent parfois les mâchefers dans leur concurrence avec les matériaux naturels, la position de la couche de remblai en fond de structure routière réduit les risques.

3.2    L'utilisation en couches de forme et en assises de chaussée


Couches de forme et assises de chaussées (couche de fondation + couche de base) se situent en haut de la structure routière. Leur présence près de la couche de roulement rend ici l’utilisation de mâchefers plus délicate. En effet, le phénomène de gonflement a pour conséquence immédiate l’apparition de désordre sur la surface routière. Pour cela, l’utilisation des MIOM dans ces couches est soumise à des critères de qualité et à des précautions d’utilisation plus sévères.

a)   L’utilisation en couches de forme

Le guide technique pour la réalisation des remblais et des couches de forme (GTR) précise pour les points suivants les critères de qualité et les caractéristiques que doivent satisfaire les mâchefers afin de pouvoir être utilisés en couche de forme :

Þ  insensibilité à l’eau ;
Þ  résistance mécanique ;
Þ  taille des plus gros éléments ;
Þ  comportement au gel.

Les MIOM sont étalés en couches de 3 à 70 cm d’épaisseur, ce qui laisse prévoir l’écoulement de quantités plus faibles que celles utilisées pour les remblais dont la hauteur de couche peut atteindre 3 mètre.

Pour ne pas modifier l’état hydrique des mâchefers, la couche de forme doit être protégée par exemple par un enduit gravillonnaire déposé immédiatement après sa mise en place.

b)   L’utilisation en assises de chaussées

L’assise de chaussée est constituée de la couche de fondation et de la couche de base. La nature des mâchefers limite leur emploi à la seule couche de fondation (Cf. : schéma p17). Les conditions d’utilisation sont définies par les normes granulats XP P 18-540 et grave non traitée NF P 98-129.

Si certaines suspicions demeurent quant à l’utilisation de mâchefers bruts en couches de forme et en assises de chaussées, une expérience réalisée par le Laboratoire Central des Ponts et Chaussées (LCPC) sur des ouvrages routiers datant de plus de 20 ans permet de formuler un avis plus optimiste (Cf. : bulletin des laboratoires des ponts et chaussées n°227 ; juillet - août 2000). Dans les tranchées effectuées sur les deux ouvrages étudiés, les matériaux ont montré un comportement mécanique et environnemental très satisfaisant. L’hétérogénéité du produit et sa sensibilité aux variations de teneur en eau ont été révélées. Toutefois aucun désordre externe n’a pu être constaté sur la surface routière.

Les limites de cette expérience résident dans le manque de connaissances de l’état initial des mâchefers. En effet, on peut supposer des teneurs en verre supérieures à celles couramment mesurées aujourd’hui du fait de l’absence de collecte sélective. Ce paramètre peut suffire à conférer aux produits qui ont été utilisés une meilleure qualité de portance ainsi qu’une sensibilité au gonflement inférieure.

Les résultats des nombreuses expériences en cours, tant sur les mâchefers bruts que sur les mâchefers traités aux liants hydrauliques, viendront confirmer la pertinence d’utiliser les MIOM pour ce type de couches routières.

Les producteurs de mâchefers tentent par l'addition de liants hydrauliques de développer les caractéristiques géotechniques afin d'assurer plus de garanties lors de leur utilisation. Dans ce cas, les mâchefers peuvent être vendus à un prix supérieur à celui du matériau brut. C'est la raison pour laquelle les producteurs tentent d'élaborer des mâchefers de qualité supérieure.

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