DOSSIER DE PRESSE DU 4 JUIN 2004

UN COUP D'ARRET A LA DYNAMIQUE DU RECYCLAGE - PARTIE I


Au cours de la dernière décennie, la gestion des déchets ménagers s'est caractérisée par la mise en place et la montée en puissance de la collecte sélective des déchets d'emballages ménagers. La prise en charge financière de l'élimination des déchets d'emballages ménagers, issue des contributions perçues sur les producteurs de biens emballés, est réalisée depuis 1999 grâce à un barème de rétribution des collectivités locales, appelé barème C, qui avec son caractère fortement incitatif, a contribué à mettre en place une véritable dynamique de recyclage. Or, le nouveau barème issu de la demande d'agrément des sociétés agréées, appelé barème D, rompt avec cet aspect fortement mobilisateur.

Le Cercle National du Recyclage estime que si la collecte sélective des déchets d'emballages ménagers existe dans la quasi-totalité des collectivités françaises, les quantités de déchets d'emballages ménagers récupérés sont loin d'être satisfaisantes. Le manque d'ambition de ce nouveau barème risque donc d'entraîner un arrêt de la dynamique mise en place et une relative stagnation des performances.
Le barème D soulève deux inquiétudes :

1 - Un gisement de dechets d'emballages menagers de reference revu la baisse


L'évaluation du gisement des déchets d'emballages ménagers repose sur des estimations nationales et elle est souvent basée sur des déclarations. L'Ademe a jugé que le gisement de déchets d'emballages ménagers, estimé en 1999 à 112 kg/an/hab., était surévalué et l'a revu à la baisse, parfois dans des proportions importantes (près de 50 % pour l'acier ou le papier/carton). Ce gisement est actuellement estimé à 86,1 kg/an/hab., soit une diminution de 23 % par rapport à 1999.

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Le gisement servant de référence définit le taux de récupération des déchets d'emballages ménagers.

Cette diminution a une double conséquence :
Les deux exemples ci-dessous illustrent les conséquences pratiques de cette diminution du gisement de référence.

1.1 - Acier


Si la collectivité locale collecte 3 kg de déchets d'emballages ménagers acier par habitant et par an, elle ne récupère que 25 % du gisement estimé en 1999 (3 kg comparés à 12 kg du gisement en 1999). Les mêmes quantités collectées porteront le taux de récupération à 47 % du gisement estimé en 2003 (3 kg comparés à 6,4 kg du nouveau gisement 2003), soit un doublement de son taux de récupération, sans pour autant livrer des quantités déchets d'emballages ménagers acier supplémentaires.

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1.2 - Papier-carton


Si la collectivité locale collecte 20 kg de déchets d'emballages papier-carton par habitant et par an, elle récupère 62,5 % du gisement estimé en 1999 (20 kg comparés à 32 kg de gisement en 1999). Les mêmes quantités collectées porteront le taux de récupération à 110,5 % du gisement estimé en 2003 (20 kg comparés à 18,1 kg du nouveau gisement 2003). Dans le premier cas, elle a de bonnes performances ; dans le deuxième cas, elle récupère plus que le gisement des déchets d'emballages ménagers papier-carton.


Cette augmentation apparente du taux de récupération des collectivités locales peut sembler avantageuse, mais elle tend à rendre suspecte la notion même de performance qui peut varier en fonction de conventions de calcul. Il devient donc urgent d'entreprendre une campagne nationale de caractérisations des déchets ménagers, afin de lever, autant que possible, les incertitudes sur le gisement des déchets d'emballages ménagers.

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Le Ministère de l'Ecologie et du Développement Durable lui-même semble manifester une certaine inconstance dans ses données de référence. En effet, dans le projet de cahier des charges annexé aux arrêtés d'agrément le gisement est évalué à 86,1 kg/an/hab. Sur le site Internet du Ministère, la rubrique « je trie mes déchets », datée du 5 mai 2004, comprend la mention suivante :

« Chaque Français génère en moyenne 360 kg de déchets ménagers par an. Les emballages (bouteilles, cartons, boîtes de conserve …) représentent 30 % environ du poids total. »


Remarquons que 30 % de 360 kg/an/hab. représentent 108 kg/an/hab. et non 86,1 kg/an/hab.


Enfin, le nouvel agrément ne comprend plus aucune possibilité de prendre en compte les variations locales du gisement (clause dite des 20 %). Une telle mesure défavorise toutes les collectivités à faible production de déchets ménagers, alors même que la réduction des quantités de déchets fait l'objet d'une politique nationale de prévention. Cette situation est d'autant plus regrettable que le bien-fondé d'une telle mesure n'a jamais été contesté ; la clause de variation locale du gisement de déchets ménagers a été abandonnée, faute de moyens de contrôler la réalité des productions de déchets, alors même que le barème D développe les contrôles en entrée et sortie des centres de tri.

2 - Des objectifs moins ambitieux


La comparaison des objectifs définis par les cahiers des charges des agréments « barème C » et « barème D » suscite quelques inquiétudes sur les objectifs de la politique française de développement du recyclage.

Cahier des charges pour l'agrément d'un organisme agréé en application du décret n°92-377
annexé à l'arrêté d'agrément du 11 juin 1999.
« L'objectif chiffré est d'atteindre à l'échéance du 30 juin 2001 les taux fixés par la Directive Emballages, à savoir 50 à 60 % en poids de valorisation globale dont 25 à 45 % de recyclage, tous matériaux confondus, avec un minimum de 15 % de recyclage pour chaque matériau, puis au 31/12/2002 un taux de valorisation globale d'au moins 75 % des déchets d'emballages ménagers pour lesquels les personnes visées à l'article 4 du décret n° 92-377 auront contracté avec le titulaire. »

Pour mémoire, le Cercle National du Recyclage attend toujours la réponse du Ministère de l'Ecologie et du Développement Durable sur les éventuelles sanctions à prendre en cas de manquement à la réalisation des objectifs. Au 31 décembre 2002 le taux de valorisation des déchets d'emballages ménagers atteint par Eco-Emballages était de 73,1 %.


Projet de cahier des charges pour l'agrément d'un organisme agréé en application du décret n°92-377
annexé au nouvel arrêté.

« Le titulaire contribue à l'atteinte des objectifs de valorisation et de recyclage globaux fixés par la directive 2004/12/CE du 11 février 2004 emballages et déchets d'emballages. Ces objectifs sont d'atteindre au 31 décembre 2008 au moins un taux de valorisation de 60% et un taux de recyclage de 55%.

L'annexe I précise les taux que le titulaire pense atteindre au 31 décembre 2008, en vue de contribuer à l'atteinte des objectifs globaux. A minima, le titulaire doit atteindre les taux de recyclage suivants :

Taux de recyclage Acier : 75 %

Taux de recyclage Aluminium : 30 %

Taux de recyclage Papier-carton : 50 %

Taux de recyclage Plastiques : 21,5 %

Taux de recyclage Verre : 65 % »


Contrairement aux pratiques retenues dans le précédent agrément, le Ministère de l'Ecologie et du Développement Durable n'a plus assigné d'objectifs globaux particuliers, différents de ceux de la directive. Les sociétés agréées ne devront que contribuer «   à l'atteinte des objectifs de valorisation et de recyclage globaux fixés par la directive 2004/12/CE du 11 février 2004 emballages et déchets d'emballages ». Il est donc intéressant de comparer les objectifs 2008 et les résultats atteint par Eco-Emballages en 2002.

Le niveau des objectifs a deux utilisations distinctes :
* Le calcul du montant du point vert pour chaque catégorie de matériau ;
* L'affichage d'une volonté de développer une politique ambitieuse de recyclage des déchets d'emballages ménagers.

De ce fait, l'ambition politique a disparu sous les calculs de répartition de l'effort financier entre les différentes filières de matériaux. S'il est normal que les sociétés agréées se préoccupent d'assurer une équité de traitement entre leurs contributeurs, il est regrettable que le Ministère de l'Ecologie et du Développement Durable adopte les mêmes critères pour définir les objectifs de sa politique. Une telle réduction des ambitions pourrait être perçu comme un désengagement de l'Etat dans la politique de recyclage et de modernisation de la gestion des déchets ménagers.

Le Cercle National du Recyclage demande

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