Courriers

Date : le 16 octobre 2013, à Lille

Destinataires : Monsieur Philippe MARTIN, Ministre de l’Ecologie du Développement durable et de l’Energie ;
                        Monsieur Pierre MOSCOVICI, Ministre de l'économie et des finances

Monsieur le Ministre,

Dans un précédent courrier, nous vous avions fait part de notre vive inquiétude concernant les hausses successives du taux de TVA, qui s’applique au service public de gestion des déchets.

En France, le coût de la gestion des déchets ménagers est évaluée à 7 milliards d’euros par an, soit environ 110 euros par habitant, dont 20 % correspondent à des taxes nationales régulièrement réévaluées.

En effet, les prestations de collecte et de traitement des déchets étaient précédemment soumises au taux réduit de TVA, jusqu’au 1er janvier 2012, date à partir de laquelle ce taux a connu une première hausse, passant de 5,5 à 7 %.

Dans le cadre du « Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi », il est prévu qu’au 1er janvier 2014, les taux de TVA varient, à la hausse, faisant passer ce taux de 7 à 10 %. Seul le taux de TVA applicable aux services et produits de première nécessité diminuera, en passant à 5 %.

Ainsi, le projet de loi de finances 2013, prévoyant une hausse de la fiscalité portant de facto sur ce type de service public, va coûter près de 100 millions d’euros supplémentaires aux collectivités. En cette période de difficultés économiques et de restrictions budgétaires, les collectivités devront une nouvelle fois, soit sacrifier certains budgets pour compenser cette hausse, soit répercuter cette nouvelle augmentation sur les contribuables, accentuant la pression fiscale. Ni l’une ni l’autre solution n’est envisageable.

C’est la raison pour laquelle l’ensemble des collectivités locales présentes lors de notre Assemblée Générale et de notre Forum, qui se sont tenus le 19 septembre 2013 à Paris, se sont unanimement exprimées pour l’application d’un taux réduit de TVA à 5 %.

De même, dans le cadre de la préparation de la table ronde « Economie circulaire et déchets » de la Conférence environnementale, les membres du Conseil National des Déchets se sont prononcés unanimement, pour la « reconnaissance de la nature de Service public de première nécessité du service public de gestion des déchets ménagers et donc l’application du taux de TVA auquel elle est soumise à 5 % ».

Au niveau international, dans la « Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé », adoptée par l’assemblée générale de l’Organisation Mondiale de la Santé en mai 2001 et ratifiée par la France le 18 février 2010, les services de première nécessité sont décrits comme étant les « services et programmes, y compris ceux qui s’en occupent, fournissant à l’ensemble de la population l’énergie (carburant et électricité), les systèmes d’assainissement, l’eau et autres services essentiels [..] pour les consommateurs des zones résidentielles et commerciales ».

Dans le cadre des grandes conférences mondiales, la France défend, depuis le Sommet mondial du développement durable à Johannesburg d’août 2002, le projet d’une « Déclaration des droits d’accès aux services essentiels », déclinaison internationale de La Charte d’accès aux services essentiels, créée par l’Institut de Gestion Déléguée. Cette charte définit les services essentiels comme « les services vitaux ou les services de base indispensables à une vie digne ou décente » et précise, dans son article 1er, qu’il s’agit notamment des « services de propreté et d’élimination des déchets ».

La compétence collecte et élimination des déchets a été transférée aux collectivités locales au titre de la salubrité publique.

Cette responsabilité de salubrité publique est nécessaire pour éviter tout effet nocif sur « le sol, la flore…, dégrader les sites…, polluer l’air ou les eaux, engendrer des bruits et des odeurs…, porter atteinte à la santé de l’homme et à l’environnement ». Il convient de souligner les efforts continus des collectivités pour optimiser leur service de gestion des déchets, dans le but de garantir la satisfaction des usagers tout en maximisant les coûts d’exploitation.

Certaines collectivités parviennent à maintenir, voire même à baisser la fiscalité liée à la gestion des déchets, grâce à leur forte mobilisation et aux efforts continus de leurs habitants, qui veillent à réduire leurs déchets et à trier avec rigueur. C’est un signal fort qui est envoyé à l’éco-citoyen : qu’en sera-t-il demain avec une fiscalité revue à la hausse ?

Aujourd’hui, la nécessité et la continuité de ce service de gestion des déchets sont incontestables pour garantir la qualité du cadre de vie de nos habitants.

C’est pourquoi, pour des raisons sociétales, environnementales et économiques, je me permets de vous interpeller à nouveau sur le bien-fondé de considérer la collecte et le traitement des déchets comme un service de première nécessité. L’application d’un taux de TVA autre que 5 % pour ce type de service ne saurait être qu’un oubli et, même en temps de rigueur, il est encore possible de faire des choix justes, sur le plan social, pour les collectivités et l’ensemble des contribuables.

Enfin, je vous prie de trouver, jointes à ce courrier, la copie de la charte des services essentiels et la copie de l’amendement Rect datant du 25 novembre 2011, dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2011. Cet amendement avait été déposé notamment par les députés MOSCOVICI et SAPIN, aujourd’hui Ministres. Il y était demandé de « maintenir un taux réduit de TVA à 5,5 % pour les prestations de collecte, de tri et de traitement des déchets », par souci de « justice » envers des millions de français.

Je compte sur votre bienveillance pour porter cette revendication auprès des autres ministres du gouvernement et aboutir ainsi à l’officialisation de service de première nécessité pour le service public des déchets.

Dans l’attente de votre réponse, je vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de ma haute considération.
 
Yves FAURE
Président

Copie : Députés de la commission des finances de l’économie générale et du contrôle budgétaire
Sénateurs de la commission des finances

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