Date |
Lille le 14 octobre 2002 |
Destinataire
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Monsieur Philippe VESSERON, Ministère de l'Ecologie et du Développement durable |
Monsieur le Directeur,
A l'occasion de la dernière réunion du comité de concertation Association des Maires de France/sociétés agréées «emballages ménagers», j'ai pu prendre connaissance de votre courrier fait en date du 15 juillet 2002 à Monsieur Eric GUILLON, directeur général d'Eco-Emballages, en réponse à son interrogation quant au financement de l'élimination des «déchets d'emballages assimilés».
Une lecture attentive de cette correspondance m'amène à vous faire part de notre profond désaccord quant aux différents éléments présentés et qui sont sensés valider votre «arbitrage». Je déplore la légèreté de votre réponse et surtout l'absence d'argumentation fondée qui ne manque pas aujourd'hui de servir l'intérêt de la société anonyme au détriment de celui des collectivités et des contribuables (cf. : copie du récent communiqué de presse émis par Eco-Emballages).
Ainsi, dès le deuxième paragraphe de votre courrier, vous vous placez a priori dans la perspective de pouvoir justifier les réfactions des soutiens alloués par Eco-Emballages aux collectivités locales au titre des déchets d'emballages papier-carton. Vous précisez que la question de la distinction entre déchets d'emballages ménagers (DEM) et déchets d'emballages industriels et commerciaux (DEIC) ne se pose pas pour l'acier, l'aluminium, le plastique et le verre, matériaux pour lesquels il existe une impossibilité à différencier «au stade collecte-tri, les emballages (bouteilles, canettes, ...) issus des ménages de ceux qui sont issus des commerces, bureaux, collectivités ou industries». Pour autant, vous ne faites pas valoir de raisons susceptibles d'expliquer en quoi cette distinction serait possible pour les emballages papier-carton.
Au troisième paragraphe, vous semblez entériner le résultat des campagnes de caractérisation des déchets d'emballages «collectés par Eco-Emballages (sic !)» tels que transmis par la société anonyme. Même si un usage habile du conditionnel laisse à penser que diverses incertitudes pourraient subsister, il apparaît qu'il n'est pas du ressort des pouvoirs publics de vérifier ni la méthode d'analyse utilisée (quels critères ? quels échantillons ? etc.) ni les informations issues de ces caractérisations. Au-delà de cette précaution, c'est bien donc l'hypothèse de la véracité des données transmises par Eco-Emballages qui prévaut et qui légitime la suite de votre courrier.
Le paragraphe cinq débute par un rappel réglementaire qui précise que le décret n° 92-377 du 1er avril 1992 s'applique «aux seuls déchets d'emballages dont les détenteurs finaux sont les ménages». Vous conviendrez que cela ne présume en rien de l'origine de ces déchets d'emballages. Seul intervient ici le critère de «possession» finale des emballages. Par ailleurs, l'élimination «des déchets résultant de l'abandon des emballages servant à commercialiser les produits consacrés ou utilisés par les ménages» est régie par les dispositions du décret du 1er avril 1992. Notre interprétation du texte permet de conclure que tous les emballages abandonnés par les ménages quelle que soit leur origine doivent donner lieu à contribution des producteurs ayant choisi de recourir aux services d'un organisme agréé. Or ce n'est pas le cas aujourd'hui.
Au paragraphe six de votre courrier, vous reprenez l'intégralité de l'interprétation de la réglementation actuelle proposée par Eco-Emballages. Nous sommes d'accord avec vous pour considérer que le service d'élimination des DEIC doit être financé par la redevance spéciale en cas d'une prise en charge par le circuit de collecte municipal. Il n'en demeure pas moins que d'une part, des déchets d'emballages d'origine industrielle peuvent être présentés à la collecte par les ménages et que dans ce cas il relèvent du décret du 1er avril 1992 et que d'autre part, en cas d'assimilation il devient impossible après collecte de distinguer l'origine des déchets d'emballages.
C'est bien ici que l'attitude d'Eco-Emballages est inacceptable car la société anonyme a basé la réfaction de ces soutiens sur les résultats d'une analyse où les critères de distinction ne sont pas pertinents parce que ne dépassant pas l'impossibilité physique de distinguer l'origine des flux en cas d'assimilation. Pour mémoire, il convient ici de rappeler que les résultats de valorisation présentés par Eco-Emballages pour 2001 ne tiennent pas compte des résultats de caractérisation et intègrent toutes les tonnes livrées aux repreneurs. La position de la société anonyme est donc incohérente et s'explique uniquement par une mauvaise prévision de dépenses dues à une mauvaise appréciation des effets du barème à la performance. Confrontée à un déséquilibre financier important, Eco-Emballages a préféré en attribuer la responsabilité aux collectivités locales dont les pratiques jugées jusqu'alors vertueuses sont aujourd'hui dénoncées comme empreintes de tricherie voire de malhonnêteté.
Comme vous l'évoquez aux derniers paragraphes de votre lettre, les pistes de progrès consistent plutôt à appliquer la loi en ce qui concerne la mise en œuvre de la redevance spéciale et aussi à mieux cerner le gisement d'emballages contribuant en précisant les règles d'utilisation du point vert ou de tout autre système de marquage permettant de reconnaître l'emballage comme contribuant.
Sans prétendre au paiement par Eco-Emballages de soutiens au titre d'emballages n'ayant pas contribué, nous récusons, dans l'état actuel des pratiques, les conclusions tirées des campagnes de caractérisation. Bien entendu, il ne s'agit pas pour le Cercle National du Recyclage de chercher à justifier des pratiques déviantes qui conduiraient à fournir aux repreneurs des balles d'EMR composées pour une bonne part de journaux-magazines ou d'autres déchets papier-carton non issus d'emballages.
Dans l'attente d'une clarification, nous ne saurions toutefois accepter de voir les règles en vigueur depuis l'origine transformées sur la seule initiative de la société agréée dans l'unique but de limiter les sommes versées aux collectivités locales. Au Cercle National du Recyclage, nous considérons comme particulièrement malvenu de la part d'Eco-Emballages de mettre en avant le déséquilibre financier alors que seulement 45 % du gisement d'emballages papier-carton contribuant à la société agréée est actuellement valorisé. L'argument présenté ne sera recevable qu'au cas où le taux de valorisation dépasserait les 100 %. Pour information, en Belgique ce taux est en 2001 pour les papiers-cartons de 118,1 % sans que pour autant l'organisme FOST PLUS suspende ou réduise ses soutiens aux collectivités.
Nous dénonçons donc la méthode, maladroite à nos yeux, employée par Eco-Emballages pour faire pression sur les collectivités locales et les pouvoirs publics dans la perspective d'un élargissement de l'assiette des emballages contribuants aux emballages industriels et commerciaux, d'abord les papiers-cartons et, peut-être, de proche en proche, pour tous les emballages.
J'attire votre attention sur le fait qu'en l'état actuel de la réglementation une harmonisation des régimes «emballages ménagers» et «emballages industriels et commerciaux» n'est pas possible. De plus, au vu des réticences rencontrées en 1992 et qui persistent toujours aujourd'hui chez les potentiels contributeurs, l'évolution paraît difficilement envisageable. Elle aurait de plus comme conséquence de mettre à mal un dispositif performant qui depuis 1992 responsabilise les industriels et permet d'atteindre des taux de récupération et de valorisation des DEIC très satisfaisants. Au final, en ouvrant la possibilité aux filières associées à la société agréée de se procurer des matériaux à moindre coût, on observerait sans doute une déstabilisation du marché des papiers-cartons récupérés
Je reste à votre disposition et à celle de vos services pour, si vous le souhaitez, préciser les raisons qui fondent nos expressions et prises de position sur ces sujets.
Sûr de votre aimable attention, je vous prie d'agréer, Monsieur le Directeur , l'expression de mes salutations distinguées.
Paul DEFFONTAINE
Président
Maire de Willems
Vice-Président de
Lille Métropole Communauté Urbaine
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