COURRIER

Date Lille le 4 mars 2003
Destinataire Monsieur Jacques PELISSARD, 1er Vice-Président , Association des Maires de France

                   Monsieur le 1er Vice-Président,

       
La dernière réunion du comité de concertation collectivités locales/sociétés agréées a fait naître en moi un profond sentiment d'amertume. Comme semble en attester votre prévenance à mon endroit à l'issue de cette réunion, vous n'avez pas manqué d'observer que mon irritation s'est traduite par une attitude de retrait total des discussions.

        Plusieurs raisons expliquent ma décision de ne pas prendre part au débat et de ne pas faire connaître mon appréciation quant aux éléments présentés par les sociétés Eco-Emballages et Adelphe.

        En premier lieu, je déplore le manque préalable de définition entre élus d'une position à défendre dans le cadre de l'élaboration du nouveau barème de soutiens aux collectivités locales. Aucun objectif n'a été identifié ; aucun principe n'a été arrêté ; aucune revendication n'a été formulée. Au final, nous avons donc assisté à une présentation où la seule option retenue par les sociétés agréées a été de limiter les effets qualifiés de « pervers » de la majoration des soutiens en fonction de la performance de collecte. Exemple frappant de l'inconséquence de notre comité quant à la défense des usagers du service public d'élimination des déchets municipaux puisque ces soutiens alloués aux collectivités locales ne couvrent toujours pas, loin s'en faut, les coûts d'élimination des déchets d'emballages ménagers qu'elles supportent.

        En second lieu, je veux rappeler que le comité technique placé sous la présidence de Monsieur Francis CHALOT avait reçu comme mandat au moment de sa création le 1er octobre 2002 de « proposer au comité de concertation un projet de nouveau barème » (cf. : compte rendu de la réunion du comité de concertation collectivités locales/sociétés agréées du 1er octobre 2002). Il avait par ailleurs été convenu qu'il n'appartiendrait pas à ce comité technique de débatte de la hauteur de l'engagement financier des sociétés agréées mais bien des seuls mécanismes de distribution des soutiens. Réuni à deux reprises, le 8 novembre et le 12 décembre 2002, ce groupe technique n'avait rendu, en date du 26 février, aucune conclusion susceptible de valider une évolution de la structure du barème plutôt qu'une autre. Je précise ici que le Cercle National du Recyclage, à la demande de Monsieur Francis CHALOT, a réalisé une note qui explicite notre proposition d'évolution du barème de soutiens aux collectivités locales. Au vu du peu de cas fait de cette note, je l'ai adressée en date du 3 janvier 2003 aux membres du comité de concertation dans la perspective de nourrir nos réflexions à venir. Pour autant, au cours de notre réunion du 26 février, seules les propositions d'Eco-Emballages, d'ailleurs quelque peu différentes de celles évoquées au comité technique, ont été présentées sans qu'il soit fait mention ni d'un consensus établi ni des propositions alternatives. Je ne peux me satisfaire de ces procédés qui conduisent à la totale négation des apports autres que ceux des sociétés agréées. Constatant de plus que le mandat initial du groupe technique a été profondément modifié sur la seule demande de Monsieur Eric GUILLON, directeur général d'Eco-Emballages, vous ne vous étonnerez pas de ma décision de suspendre la participation du Cercle National du Recyclage à des travaux dont je réfute la légitimité et le bien-fondé.

        En troisième lieu, je souligne la différence d'approche qui m'apparaît au sein de l'Association des Maires de France entre les propos et les positions tenus au comité de concertation et à la commission « Environnement et développement durable ». Je constate en effet qu'à l'intérieur de cette instance, il se dégage un accord de fond quant à la nécessité d'un engagement financier des industriels à hauteur des dépenses engagées par les collectivités locales pour l'élimination des déchets. Pour preuve, les discussions récentes au sujet de la question de l'élimination des déchets d'équipement électriques et électroniques (DEEE) qui ont abouti à l'expression d'une revendication ferme de l'Association des Maires de France pour assurer les collectivités locales d'un dédommagement total en cas d'élimination des DEEE sur le principe du volontariat. Pourquoi l'AMF n'adopterait-elle pas le même point de vue en ce qui concerne l'élimination des déchets d'emballages ménagers ?

        Je tiens ici à rappeler que le comité de concertation a été créé en 1994 par Monsieur Jean-Paul DELEVOYE, sur proposition de nombreux élus inquiets des méthodes de négociations d'Eco-Emballages. Sa vocation était d'être le lieu d'échanges et de débats, entre élus d'abord puis en compagnie des responsables des sociétés Adelphe et Eco-Emballages, préalables à l'établissement de relations équilibrées entre les différentes parties concernées par le dispositif français d'élimination des déchets d'emballages ménagers. C'est d'ailleurs dans la perspective d'apporter à ce comité une compétence technique dans le domaine de la collecte sélective et de tri des déchets recyclables que nous avions créé ensemble, avec Monsieur Yves PIETRASANTA, le Cercle National du Recyclage . Près de 10 ans après sa constitution, le comité de concertation s'apparente trop souvent à une chambre d'enregistrement des demandes et propositions d'Eco-Emballages et Adelphe au détriment de l'intérêt financier de nos collectivités et de leurs usagers.

        Au vu du fonctionnement actuel du comité de concertation et sans assurance réelle au sujet de l'élévation du niveau de soutien de la part des sociétés Adelphe et Eco-Emballages, je demande que toutes les discussions afférentes à l'évolution des relations contractuelles entre ces sociétés et collectivités puissent se tenir dans le cadre des réunions de la commission « Environnement et développement durable » de l'AMF pour ensuite, éventuellement et si nécessaire, être poursuivies au comité de concertation.

        Si vous le souhaitez, je me tiens à votre disposition et à celle de nos collègues pour détailler les raisons aujourd'hui trop nombreuses qui me pousse à adopter cette attitude délibérément critique mais aussi, je l'espère, source de renouveau. Je reste en effet animé par la volonté d'apporter à l'Association des Maires de France les bases d'une argumentation pertinente et aussi de la faire bénéficier de l'expérience acquise sur ces sujets depuis plus de dix ans.

        Je vous prie d'agréer, Monsieur le 1er Vice-Président, l'expression de mes salutations distinguées.

Paul DEFFONTAINE
Président

Copie à :
Monsieur Daniel HOEFFEL, président, AMF
Monsieur Denis MERVILLE, président, Commission "Environnement et Développement Durable", AMF
les membres du comité de concertation