LES MODES DE COOPERATION  POUR LES INTERCOMMUNALITES EN CHARGE DE LA GESTION DES DECHETS

 

III.    D’AUTRES EXEMPLES DE COOPÉRATION


1.    Assistance

1.    Coopération européenne : Communauté urbaine de Strasbourg et Ortenau

La communauté urbaine de Strasbourg et Ortenaukreise en Allemagne ont signé une convention d’assistance mutuelle. Elle permet aux deux collectivités de se porter assistance en cas d’indisponibilités temporaires de leurs installations de traitement. L’objectif des deux collectivités est de s’entraider lors de limitations temporaires de capacité, notamment lors d’arrêts momentanés d’une des installations liés à des entretiens ou des pannes.
Cette convention rentre dans le cadre d’une coopération transfrontalière développée sur le territoire de la communauté urbaine et Ortenaukreise, l’Eurodistrict.

La convention est régie par l’accord de Karlsruhe du 23 janvier 1996 sur la coopération transfrontalière. Son  article 3 précise que «  Les collectivités territoriales ou organismes publics locaux peuvent conclure entre eux des conventions de coopération dans les domaines de compétence communs qu'ils détiennent en vertu du droit interne qui leur est applicable. » L’objet de la convention doit permettre aux partenaires de coordonner leurs décisions, de réaliser et de gérer ensemble des équipements ou des services publics d'intérêt local commun.

La communauté urbaine de Strasbourg possède une unité d’incinération des ordures ménagères et l’Ortenaukreis dispose d’une installation de traitement biomécanique des OMR, qui produit du biogaz et des combustibles à haut pouvoir calorifique. Elles sont distantes d’environ 50 km. Les unités appartiennent aux deux entités, mais ce sont les deux exploitants qui mettent en place un contrat d’assurance. Cette convention a été conclue pour une durée de 5 ans. Cette assistance mutuelle doit se faire dans le respect de la réglementation applicable aux mouvements transfrontaliers. Ainsi tous les ans, les exploitants doivent constitués un dossier de notification de transferts de déchets transfrontaliers.

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Rappel : Réglementation transport transfrontalier déchets (Source ADEME)
Les transferts transfrontaliers de déchets sont régit par le Règlement (CE) n° 1013/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2006.
Le présent règlement prévoit deux procédures de contrôle des transferts de déchets :
  • la procédure de notification et de consentement écrits préalables : celle-ci s'applique aux transferts de tous les déchets destinés à être éliminés et des déchets dangereux et semi-dangereux destinés à être valorisés;
  • la procédure de transferts accompagnés de certaines informations : celle-ci s'applique aux déchets non dangereux destinés à être valorisés.
Le règlement définit trois listes de déchets
  • la « liste orange » (annexe IV) : les déchets soumis à notification et consentement,
  • la « liste verte » (annexe III) : les déchets soumis uniquement à information,
  • les déchets dont le transfert est interdit (annexe V).
Le transfert des déchets soumis à notification doit faire l'objet d'un contrat entre la personne qui a la charge du transfert ou de faire transférer les déchets et le destinataire de ces déchets. Ce contrat doit être assorti de garanties financières lorsque les déchets en question sont soumis à une exigence de notification.
Dans le cadre de la procédure de notification, la notification doit être envoyée par le notifiant seulement à l'autorité compétente d'expédition, laquelle est chargée de transmettre cette notification aux autorités compétentes de destination et de transit. Les autorités compétentes doivent donner leur consentement (avec ou sans conditions) ou leurs objections dans un délai de 30 jours. Les modifications portant sur des éléments essentiels du transfert (quantité, itinéraire, etc.) doivent faire l'objet d'une nouvelle notification, sauf si toutes les autorités compétentes dispensent le notifiant de cette obligation.


L’arrêté portant autorisation et réglementation de l’exploitation d’un incinérateur précise que les déchets autorisés à être incinérés sont prioritairement ceux de la collectivité ou du groupement propriétaire de l’unité, et à titre occasionnel, selon les disponibilités, ceux d’autres producteurs du reste du département ou des départements limitrophes sous réserve du respect des orientations fixées par les plans de prévention et de gestion des déchets non dangereux applicables. Or aujourd’hui, ces plans préconise généralement une politique d’indépendance départementale et d’appliquer le principe de proximité aux transferts de déchets, ce qui peut limiter le transfert de déchets entre deux collectivités voisines si elles n’appartiennent pas au même département.

2.    Coopération ponctuelle : Communauté de communes du Pays de Mormal et Maroilles et Communauté de communes du Cœur de l’Avesnois

La Communauté de communes du Pays de Mormal et Maroilles (2C2M) a signé une convention avec la Communauté de communes du Cœur de l’Avesnois permettant l’utilisation de sa déchèterie. Elle prévoyait notamment l’accès de la déchèterie aux habitants de trois communes (Beaurepaire-sur-Sambre, Noyelles et Prisches) membres de la Communauté de communes du Cœur de l’Avesnois, nouvellement créée.

Cette convention a été conclue pour 3 mois d’avril à juin 2012 afin de permettre à la Communauté de communes du Cœur de l’Avesnois d’effectuer les travaux nécessaires dans la déchèterie lui appartenant.

La Communauté de communes du Cœur de l’Avesnois s’est engagée à prendre en charge le coût de fonctionnement de la déchèterie au prorata de la population des 3 communes acceptées, soit 1 550 habitants.
Ce coût de fonctionnement net TTC de la déchèterie comprenait :

-    le coût du gardiennage ;
-    le coût du transport des déchets ;
-    le coût du traitement des déchets (notamment et de façon non exhaustive le tri, la valorisation matière, le déchiquetage, l’incinération) ;
-    l’ensemble des frais payés par la 2C2M pour le fonctionnement de la présente déchèterie, notamment et de façon non exhaustive les frais d’eau, de gaz, d’électricité, de fioul, de téléphone, l’assurance, les impôts et les taxes ;
-    les travaux d’entretien nécessaires au bon fonctionnement de la structure dans les conditions que sont en droit d’attendre les administrés ;
-    le coût de l’encadrement administratif du personnel de la déchèterie ;
-    le coût de la communication liée à la déchèterie.

Ce coût a été fixé par délibération à 16,50 € TTC par habitant par an.

Dans la convention, il est rappelé que celle-ci ne préjuge pas des contrats et opérations conclus auparavant par la 2C2M en sa qualité de gestionnaire de la déchèterie.

La convention prévoit également que la 2C2M doit communiquer à la Communauté de communes du Cœur de l’Avesnois :
-    les différentes filières de traitement et l’exutoire final des déchets de la déchèterie,
-    la fréquentation en nombre de véhicules relative à la part de chacune des deux parties,
-    les statistiques sur les tonnages estimatifs de chaque partie,
-    le bilan d’activités annuel de la déchèterie.
Un élu représentatif de la Communauté de communes du Cœur de l’Avesnois était également invité à se joindre aux réunions de la commission de suivi de la déchèterie de la 2C2M.

2.    Coopération fonctionnelle

1.    Coopération du Syndicat Mixte de la Vallée de l’Oise (SMVO) et du Syndicat Départemental de traitement des déchets ménagers de l’Aisne (Valor’Aisne)

En 2013, après délibérations respectives, le SMVO et Valor’Aisne ont constitué une entente relative à la gestion des déchets en vue de mettre en place une gestion efficace et optimale des déchets ménagers sur leurs territoires.
Cette entente s’appuie sur l’article L.5221-1 du Code Général des collectivités territoriales et sur les critères fixés par la jurisprudence permettant aux coopérations entre personnes publiques d’être exonérées des règles de la commande publique. Elle répond au souhait des deux syndicats de s’inscrire dans une démarche durable d’entraide, afin de mutualiser les moyens et les ressources dont ils disposent, en vue d’optimiser la gestion des déchets sur leur territoire.

L’objet de cette convention d’entente est de permettre la coopération des deux syndicats dans l’exploitation du service public du traitement des déchets provenant des ménages, notamment des déchets recyclables issus des collectes sélectives.

Par cette convention, les deux parties conviennent de mutualiser leurs installations respectives. Chacune peut faire appel à l’autre pour traiter une partie de ses déchets.
Elle prévoit que lorsqu’une des deux parties a besoin de faire traiter ses déchets en dehors de ses installations, elle sollicite la seconde pour une acceptation des déchets sur ses équipements.
Cette demande doit préciser :

-    la nature et la quantité des déchets à traiter,
-    la durée prévisionnelle du traitement envisagée,
-    le cas échéant, la clé de répartition des déchets selon les différentes collectivités productrices,
-    la liste des repreneurs pour les différents matériaux triés.

Si l’autre partie est en mesure d’accepter, elle devra :

-    les traiter dans le respect de la réglementation en vigueur,
-    assurer la pesée et le tri des déchets entrants sur son site de traitement,
-    assurer les caractérisations entrantes des collectes sélectives,
-    affecter les matériaux triés aux collectivités productrices titulaires d’un contrat Eco-Emballages,
-    organiser les évacuations de matériaux avec les repreneurs désignés, conformément aux contrats d’Eco-Emballages et aux contrats de reprises,
-    éliminer les refus de tri,
-    fournir un compte-rendu du tri.

La convention précise que la partie demandeuse verse une compensation financière équivalente aux charges d’investissement et de fonctionnement de l’installation pour le traitement des déchets concernés.

Afin de fixer les conditions pratiques de la mise en œuvre de la convention d’entente, les deux parties doivent adoptées une convention d’application du traitement des déchets d’un des syndicats par l’autre syndicat. Cette convention définit l’objet, la nature de la prestation, sa durée et la compensation financière.

Par exemple, en mars 2013, les deux syndicats ont passé une convention d’application afin que les déchets auparavant réceptionnés dans le centre de tri de Laon-Faubourg géré par Valor’Aisne, dont le fonctionnement a cessé en avril 2013, soient accueillis dans le centre de tri de Villers Saint Paul du SMVO. Ces déchets représentent environ 150 tonnes par mois de corps creux. Cet engagement est pris pour un an et une compensation financière en euros par tonne a été fixée, comprenant les frais généraux (caractérisation, assurance, frais de fonctionnement et frais de personnel), le prix du tri révisable mensuellement et les charges d’investissement.

2.    Coopération : Dreux Agglomération, Chartres Métropole, le SOMEL et ses syndicats

Le Syndicat des Ordures Ménagères d’Eure-et-Loir (« SOMEL ») a pour membres :

-    la Communauté d’Agglomération « Dreux Agglomération »,
-    le Sictom de Brou, Bonneval, Illiers-Combray,
-    le Sictom de la région de Nogent-le-Rotrou,
-    le Sirtom des cantons de Courville sur Eure, la Loupe, Châteauneuf-en-Thymerais, Senonches,
-    le Syrom de la région de Dreux,  
-    la Communauté d’Agglomération « Chartres Métropole »,
-    et le Sirtom du Pays Chartrain.

Le SOMEL exerce, en tant que syndicat mixte, sa compétence obligatoire, en lieu et place de tous ses membres, dans les domaines de la réalisation et la gestion des quais de transfert des déchets ménagers et assimilés, du transport des déchets des quais de transfert vers l’usine d’incinération de Chartres Métropole et de la remise en état des sites et installations.
A titre optionnel, le SOMEL exerce la compétence « traitement et valorisation liée à l’incinération des déchets et assimilés », sauf pour Chartres Métropole et le Sirtom du Pays Chartrain, qui n’adhèrent pas à cette compétence.

L’ensemble de ces collectivités, étant confrontées aux défis d’une gestion plus rationnelle du service public de transport, du tri et d’élimination de leurs déchets, elles étaient conscientes que pour atteindre cet objectif, elles devaient se porter mutuellement assistance dans le cadre de leurs compétences. Elles ont donc établi une convention de coopération.

Chartres Métropole possède un centre de valorisation énergétique dont la délégation a été confiée à la société Orisane. Cette installation a été dimensionnée pour 110 000 tonnes, tandis que l’agglomération n’a un besoin que de 30 000 tonnes.
Dreux Agglomération est maître d’ouvrage et exploitant d’un centre de tri géré en régie. Sa capacité est de 20 000 tonnes, alors que Dreux Agglomération n’utilise que 2 100 tonnes.

Vu les capacités excédentaires du centre de valorisation énergétique et du centre de tri, les collectivités ont constaté l’intérêt commun de bénéficier de l’apport de déchets de chacune d’entre elles afin de rationaliser leur gestion, de mutualiser les coûts et de trouver une solution de proximité.
Ainsi, il a été conclu que le SOMEL apporte ses déchets à l’unité d’incinération de Chartres Métropole jusqu’au terme du contrat de délégation de service public passé avec Orisane (31 décembre 2018). Un avenant a du être conclu entre Chartres Métropole et le délégataire.
De manière réciproque, Chartres Métropole et les autres syndicats ont conclu des marchés distincts avec Dreux Agglomération afin de faire trier leurs déchets sur la même période.

En cas de dysfonctionnement ou d’arrêt des installations, Chartres Métropole et Dreux Agglomération s’engagent à proposer des capacités de remplacement en vue, soit de l’incinération, soit du tri des déchets.
De plus, les deux agglomérations font bénéficier aux cocontractants des mêmes tarifs que ceux dont elles bénéficient au titre soit de l’incinération, soit du tri pour leurs propres déchets.
Dans le cas de l’incinération, à l’issue de la convention, l’excédant éventuel du compte de suivi du gros entretien renouvellement prévu au contrat de délégation conclu entre Chartres Métropole et Orisane seront répartis proportionnellement à la moyenne sur les 3 dernières années des tonnages amenés à l’usine d’incinération par Chartres Métropole d’une part et le SOMEL d’autre part.

Le SOMEL s’engage, quant à lui, à faire évoluer ses statuts pour y intégrer le transfert et le transport des déchets ménagers recyclables, revues et magazines, et carton brun pré-trié vers le centre de tri de Dreux Agglomération et à mettre en place sur le territoire de Chartres Métropole, un quai de transfert permettant de regrouper les déchets qui seront acheminés vers le centre de tri. Cette réalisation est une condition de l’engagement de Chartres Métropole à cette coopération.

La convention a été conclue en 2010 pour environ 8 ans.

Les collectivités ont créées un comité technique composé d’un représentant de chacune des parties et des personnes qualifiées. Celui-ci se réunit au minimum une fois par an. Il est chargé d’assurer le suivi de la convention de coopération et est saisi de toutes demandes de modification. Ce comité technique doit être associé aux discussions relatives aux avenants qui pourraient être conclus avec le délégataire par Chartres Métropole et à celles relatives aux évolutions du centre de tri par Dreux Agglomération.

3.    Répondre à un appel d’offre

Cas de la Communauté d'agglomération du Grand Dijon

A l’origine, le Grand Dijon avait passé des conventions avec d’autres collectivités locales pour le traitement des déchets, notamment pour l’enfouissement et l’incinération.
Il y a dix ans, la Chambre régionale des comptes a demandé au Grand Dijon de sortir petit à petit de ces conventions. En effet, la gestion des déchets est une activité commerciale et donc les collectivités interviennent sur un secteur concurrentiel.

Pour rappel, avant les évolutions réglementaires et de la jurisprudence, une convention publique-publique n’était possible que si les collectivités agissaient dans leur domaine de compétence et sur un secteur non concurrentiel.
Aujourd’hui, le Grand Dijon doit donc répondre aux appels d’offres passés par des collectivités locales, il doit passer par la mise en concurrence. Les collectivités sont désormais liées par un marché public.

Ce contre-exemple montre l’importance de bien comprendre dans quel cas il est, aujourd’hui, juridiquement possible de passer une convention de coopération en étant exonéré des règles de la commande publique.

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